j'allais dans le verger ou les framboises au soleil
chantent sous l'azur à cause des mouches à miel;
C'est d'un très jeune âge que je vous parle ;
Près des montagnes je suis né ;près des montagnes:
Et je sens bien maintenant que dans mon âme
Il y a de la neige ;des torrents ;couleur de givre et
de grands pics cassés ; ou il y a des oiseaux de proie :
qui planent dans un air qui rend ivre dans un vent
qui fouette les neiges et les eaux :
oui je sens bien que je suis comme les montagnes !
Ma tristesse de la couleur des gentianes qui y croissent
Je dus avoir dans ma famille des herborisateurs
Avec des boîtes couleur d'insectes vert qui par
Les après-midi d'horrible chaleur s'enfonçaient dans
L'ombre glaçé des forêts à la recherche d'échantillons
précieux ; où les jets d'eau ont des fraîcheurs endormeuses :
Mon amour à la tendresse d'un arc-en ciel après une
pluie d'avril ou chante le soleil :
Pourquoi ai-je l'existence que j'ai ?::::::
N'étais-je fait : pour vivre sur les sommets dans l'éparpillememt
de neige ; des troupeaux ; avec un haut bâton :à l'heure où
On est grandi par la paix du jour qui tombe
FRANCIS JAMMES ; DEUIL DES PRIMEVèRES
(1901)