Tout dort rompu de lassitude;
Les hommes sont ensevelis :
Entre leurs draps de toile rude :
Dans les ténèbres des grands lits :
Les troupeaux gisent près des crèches ;
Les boeufs dans la paille affaissés.
Rêvent des près, de l'herbe fraîche ;
Et des sillons qu'ils ont tracés.
Le chien dort , et le coq sonore :
Se tient droit sur son perchoir :
Car le jour n'est pas près d'éclore :
Et le côté de l'aube est noir :
Le sommeil tient aussi les choses !
Les outils qui vivent dehors :
Les meubles que les murs enclosent
Et la maison même tout dort ;
Seule vivante en l'ombre immense
L'orloge obscure ne dort pas :
Seule: dans l'anxieux silence
Comme un pas lent mais jamais las:
Ou comme le pouls d'une artère
Ou le battement d'un coeur sourd :
Elle fait son bruit solitaire :
toujours ;toujours toujours
LOUIS MERCIER / Poème de la maison
(1910)